C’est le grand retour des books reviews après plus d’un an d’absence ! La raison ? Elle est minable: je ne prenais plus le temps de lire en raison de mes temps de trajets maison-boulot bien plus courts qu’à Paris. Cette mauvaise habitude est désormais réparée.

The Design of Everyday Things, par Donald Norman.
Ce bouquin, c’est comme ces histoires d’amour un peu mélancoliques où l’on se tourne autour sans jamais se croiser. Et lorsque l’on se croise enfin, bien des années plus tard, l’on est à la fois heureux, accompli mais quand même un peu déçu de tout ce temps perdu à lire du Pif Gadget -enfin vous voyez l’idée-.
Voilà je le dis haut et fort, ce bouquin j’aurais du le lire en 2006 lors de mon premier job. Ce bouquin, c’est exactement ce qui n’est pas enseigné dans les écoles de jeu vidéo, c’est exactement le remède à la forme contre la fonction. Ce bouquin pointe du doigt tous les travers des designers, qu’ils fassent des jeux vidéo ou des meubles IKEA.
De quoi ça parle en vrai ?
Partons d’un exemple concret: Votre machine à laver. Combien d’entre vous connaissez son fonctionnement de fond en comble ? Est-ce que vous savez ce que chaque bouton fait ? Effectivement, vous êtes comme moi et évitez tout contact avec cet instrument du diable. C’est un exemple de mauvais design.
Donald détaille le fonctionnement du cerveau humain vis-à-vis de l’utilisation quotidienne d’objets. Il est donc question de psychologie cognitive, c’est à dire la façon dont l’homme façonne les modèles de fonctionnement internes des machines par le biais des signes et des feedbacks qu’elles lui envoie. Pour une excellente ergonomie, il convient donc que les designers conçoivent leurs machines de façon à ce que l’on comprenne aisément leur rouages.
Un exemple moderne simple est la gamme de produits Apple qui, si elle n’a rien inventé techniquement, a suffisamment travaillé l’accessibilité logicielle (et a fortement orienté son marketing en conséquence) pour la rendre accessible au commun des mortels.
Dans un monde commercial régit par l’esthétique, la grande bataille des années 2000 a été d’améliorer l’expérience utilisateur sur tous les fronts.
En quoi ça s’applique au jeu ?
C’est assez facile d’extrapoler les fondamentaux décrit tout au long du livre dans nos univers vidéo-ludiques. Ce qui vient tout de suite en tête c’est tout plein de pistes pour améliorer nos tutoriaux. Mais ça n’est que la première étape.
La seconde étape ce sont tous les signes et feedbacks distillés au fil des walkthrough. Par exemple, est-ce que j’ai bien touché l’ennemi sur lequel j’ai tiré ? (Une petite croix sur le HUD et un hitsound dans Call of Duty, un effet de fresnel dans Diablo 3) Est-ce que je peux récupérer l’item au sol dont je suis à proximité ? (Une icône et le bouton associé pour la plupart des cas) Comment puis savoir si j’ai bien level up? Est-ce que les icones sont appropriées ? Est-ce qu’il ne serait pas plus intéressant d’inscrire ce genre de feedback dans le décor et non dans le HUD ? Les exemples sont légion.
La dernière étape, le joueur n’en verra pas la couleur, tout du moins pas directement. Il s’agit en effet de la qualité des outils des développeurs, franchement à la ramasse depuis des années. S’il y a eu une amélioration notable ces derniers temps, on est encore loin d’être au niveau. Le désintérêt des programmeurs pour l’ergonomie des outils en général en est le facteur principal. Il y a cependant une tendance qui va peut-être pousser les studios à y mettre davantage de ressources: La next-gen. Avec les coûts de prod pharaoniques sur la génération actuelle, il est trivial d’extrapoler sur le futur: ça va coûter de plus en plus cher. Si l’on peut réduire dramatiquement les temps d’itération grâce à des outils pensés pour l’utilisateur, des studios de taille moyenne seront capable de rivaliser avec les usines à saucisses capables de mettre 400 personnes sur un seul jeu.
Protip: Insomniac sont loin devant les autres. Inspirez-vous d’eux.