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GDC 2010: Tutorial « Level Design in a day »

Cette année j’ai eu le privilège de partir à San Francisco pour la GDC. Ca tombe bien puisque mercredi 10  j’ai eu droit à une conférence d’une journée complète sur le level design.

Et pas n’importe laquelle: une belle brochette de level designers respectés en assurait le déroulement. On y trouve notamment Ed Byrne, l’auteur de Game Level Design; Neil Alphonso, lead LD de Killzone 2 et de Brink; Joel Burgess, lead LD de Fallout 3; Matthias Worch, Senior LD sur Dead Space 2; Jim Brown, lead LD de Gears of War 1 et 2, ainsi que Coray Seifert, Game Designer et Forrest Dowling, Lead LD multijoueur, tous deux chez Kaos Studios.

La salle (c) GDC 2010
La salle (c) GDC 2010

Autant dire que j’attendais cette conférence avec impatience. Et je n’ai pas été déçu, puisque globalement elle fut à la hauteur de mes espérances. En voilà un résumé.

C’est Coray qui démarre la session, en effectuant plusieurs sondages auprès de l’assistance. Qui sommes nous ? Pas mal d’étudiants, de chômeurs, la plupart sont des LDs. Quelques GD, quelques programmeurs, quelques artistes.  Depuis combien de temps on bosse. La majorité depuis au moins un an. Un seul type a plus de 15 ans d’expérience (respect !). Pour qui on bosse. La plupart pour des éditeurs classiques. Une bonne portion est indépendante.

Ed Byrne prend la suite. Il est lead LD chez Zipper interactive (MAG, SOCOM 4), et il est dans le milieu depuis 13 ans ! Il parle de tout le processus de pré-production en level design, c’est à dire comment partir du concept jusqu’à la « manufacture » pour tous les niveaux d’un jeu. Sans rentrer dans les détails (mes notes franglaises dégueulasses sont disponibles à la fin de l’article), c’était extrêmement intéressant, même s’il faut tout de même réussir à convaincre sa hiérarchie d’instaurer un réel processus dédié à la préproduction en level design. Bon après, ça dépend du poids qu’on a dans sa boite. Dans des structures modestes ça passe plus facilement.

C’est au tour de Matthias Worch, de Visceral Games (Dead Space 2) de prendre la parole. Il parle de la création des espaces de jeu et du « level flow ». C’était globalement en dessous de la première conférence, malgré un début pas trop mal sur la façon dont l’environnement est au service du gameplay dans Bioshock. Mais le reste de sa présentation était trop superficielle par rapport aux nombreux thèmes qu’il voulait aborder. Du coup il ne faisait que survoler ou répéter ce qui avait été dit l’heure d’avant. Ceci dit, une autre conférence sur la narration environnementale était prévue le lendemain. Sauf qu’elle était pleine à craquer et que je n’ai pas pu y assister 🙁 Heureusement les slides de sa présentation sont disponibles (voir plus bas) !

Les speakers (c) GDC 2010
Les speakers (c) GDC 2010

Après la pause déjeuner, c’est Jim Brown d’Epic Games qui nous raconte comment les outils peuvent sauver la vie d’un level designer. Selon lui, les outils vont vous permettre de faire de meilleurs jeux, grâce au temps que vous aller gagner. Même si le gain n’est pas aussi signifiant. Il prend en exemple un outil lambda qui permet à une personne de gagner 2 minutes 40 par jour. Si on multiplie cette valeur par le nombre de gens qui vont l’utiliser (ici, une centaine), ça fait gagner à l’équipe 4 heures par jour, soit 20 heures par semaine. Si on étend cela à 1 an, ça fait gagner 6 mois !! Qu’est ce que vous êtes capable de faire avec 6 mois en rab ? Pas mal de choses 🙂 Chez Epic, ils l’ont compris et à chaque fin de projet ils font un bilan sur les outils parmis les responsables et les autres membres clés de l’équipe (une douzaine de personnes au total).
Jim fait ensuite un bilan des outils utilisés par l’Unreal Engine: le BSP, qui permet de prototyper/whiteboxer sans prise de tête et sans avoir besoin d’un programmeur; le Generic Browser, qui permet de rester organisé parmi les dizaines de milliers d’assets graphiques, son, anims, …; la prévisualisations en temps réel, on a le résultat de ce que l’on fait directement dans les viewports; Lightmass (leur moteur de GI), qui permet d’éviter de se prendre la tête à poser des contre-lumières pour simuler la radiosité; Kismet (script nodal) qui permet aux designers de prototyper. (Tous les protos chez Epic sont faits en kismet).
Jim conclut en disant que si on maîtrise un outil, il ne faut pas hésiter à évangéliser ce qu’on a appris à son équipe. C’est grâce à cela que l’on gagne du temps. Partagez votre savoir nom de dieu ! Et surtout allez vois vos pairs qui maitrisent d’autres tools et APPRENEZ. Vous n’en sortirez que meilleurs.
Dernier truc intéressant chez Epic, leurs Free Fridays. Tous les vendredis suivant la livraison d’une milestone, les employés sont libres de prototyper ce qu’ils veulent. Grâce à cela ils ont pu ajouter des ennemis dans Gears 2 qui n’étaient pas prévu dans le design à l’origine.

Neil Alphonso, le lead LD de Splash Damage (Brink) prend la parole. Il a également été lead LD sur Killzone 2. Sa conférence est sur l’équilibrage des maps multijoueurs et sur le placement de covers. Les 3 choses à retenir pour de l’équilibrage sont les temps de parcours, les lignes de vue et les distances de combat. Il a également fait l’apologie des caisses (!!!). En effet, les metrics (c’est à dire toutes les variables du joueur – taille debout, accroupi, allongé…-) changent constamment durant la prod. Les caisses sont parfaites pour s’adapter aux metrics, et c’est pour ça que de nombreux jeux en abusent. Quant au placement des covers, il a été assez évasif sur le sujet. C’est dommage, j’en attendais clairement plus. Il a également fait un post-mortem assez critique sur ETQW. Notamment sur la map The Ark. Le jeu était trop compliqué à cause de ces milliards de rewards à appréhender.

Ensuite, c’est le lead designer de Kaos Studios (Desert Combat, BF2, Frontlines: Fuel of War), Forest Downling, qui parle des pipelines et des workflow. Ce qui était intéressant c’est leur façon d’être parti d’une petite équipe de modmakers (12 personnes) et d’avoir monté un studio où travaillent désormais plus de 80 développeurs. Pour le reste c’était du classique. Lisez les notes en bas pour en savoir plus. Forest passe ensuite la parole à Joel Burgess, le lead LD de Bethesda sur Fallout 3. Et il nous a appris des choses assez effarantes. Par exemple sur Oblivion, ils étaient 5 artistes et 3 LDs, pour faire 255 donjons ! Du coup ils se sont organisés pour faire tomber les niveaux le plus vite possible. Leur rythme de croisière était de 15 donjons terminés par semaines ! Ils ont fait énormément de réutilisation. Sur Fallout 3, il y avait 148 « niveaux LD ». Cette fois ils étaient 6 LDs et 4 artistes. Beaucoup de collaboration pour mener le projet à son terme, et surtout l’ajout d’une 2ème couche de polish pour solidifier le tout.

L'assistance (c) GDC 2010
L'assistance (c) GDC 2010

Pour finir la journée, Joel va parler de la narration environnementale. En tant que LD, on peut conduire le joueur et lui distiller des informations sur la richesse des mondes qu’il va parcourir. Utiliser du texte n’est pas la solution ultime alors que l’on peut faire passer davantage de choses visuellement. Le mot d’ordre : brieveté et qualité du contenu ! “vigorous writing is concise” (William Strunk Jr). Il a pris comme exemples Bioshock (un cas d’école) et les safe rooms de Left 4 Dead. L’idée est que nous avons à disposition énormément de techniques visuelles de narration (architecture des niveaux et des bâtiments, éclairage, comportement des IA, les particules et autres FX, …). L’idée est de se baser sur la cognition du joueur (qu’il appelle Gestalt) pour faire en sorte que le joueur rassemble les pièces du puzzle narratif par lui-même.

Références :

14 réponses sur « GDC 2010: Tutorial « Level Design in a day » »

« Jim Brown d’Epic Games qui nous raconte comment les outils peuvent sauver la vie d’un level designer. Selon lui, les outils vont vous permettre de faire de meilleurs jeux, grâce au temps que vous aller gagner. Même si le gain n’est pas aussi signifiant »

Je comprend mieux maintenant pourquoi l’Unreal engine a autant de succès, intéressant ce résumé.

« Il prend en exemple un outil lambda qui permet à une personne de gagner 2 minutes 40 par jour. Si on multiplie cette valeur par le nombre de gens qui vont l’utiliser (ici, une centaine), ça fait gagner 4 heures par jour, soit 20 heures par semaine. Si on étend cela à 1 an, ça fait gagner 6 mois !! »

Ca fait gagner 1 mois et demi (1040 heures = 44 jours environ), pas 6 mois.

« Ca fait gagner 1 mois et demi (1040 heures = 44 jours environ), pas 6 mois. »

Hmmm, 1040h / 8 heures de travail par jour / 20 jours de travail par mois = 6,5 mois gagnés.

« sur Oblivion, ils étaient 5 artistes et 3 LDs, pour faire 255 donjons ! Du coup ils se sont organisés pour faire tomber les niveaux le plus vite possible. Leur rythme de croisière était de 15 donjons terminés par semaines ! Ils ont fait énormément de réutilisation »

15 par semaines….
tu peux en dire plus sur leur méthode? j’ai lu ses slides mais je n’ai rien trouvé de précis..

Ton hôtel était comment? 😀

Dans l’éditeur fourni dans Oblivion, ce sont des bouts de donjons qui s’imbriquent dans d’autres qui donne le donjon final (voir ca comme un puzzle). D’où la rapidité avec laquelle ils ont sortit une chiée de donj en si peut de temps (par contre niveau qualité…)

Ah super intéressant! Merci CH4NDL3R! À mon avis VALVe ont du développer pas mal d’outils dans ce genre en interne pour avoir fait L4D2 en moins d’un ans!

Pis il l’a dit lui-même que (pour ces calculs) « tout le monde sait qu’un GD ça ne bosse que 20 heures par semaine »

Je comprends maintenant pourquoi j’ai eu l’impression de faire 20 fois le même donjon dans Oblivion avant d’abandonner.

Holi : Coray, l’animateur de la session a promis d’uploader l’ensemble des slides sur le net. Par contre, aujourd’hui, rien n’a encore été mis en ligne. Joel a publié sa dernière intervention, mais elle n’inclut pas le processus de création de maps sous Oblivion et Fallout. Je suppose qu’il le fera dans les jours/semaines qui viennent.

Quant à l’hotel, je ne m’en souviens pas plus que ça 🙂

« Qu’est ce que votre équipe est capable de faire avec 6 mois en rab ? »

Ta déduction est fausse, il s’agit du temps cumulé économisé pour une personne, en jour/homme quoi. Si tu ramènes ce temps à toute l’équipe, tu n’as plus qu’à rediviser par 100.

Tiens, je découvre à l’instant, merci pour ce compte rendu ! =)

« Tous les vendredis suivant la livraison d’une milestone, les employés sont libres de prototyper ce qu’ils veulent. Grâce à cela ils ont pu ajouter des ennemis dans Gears 2 qui n’étaient pas prévu dans le design à l’origine. »

Ça m’a mis sur le cul en lisant ça. D’un bon défouloir on passe à du gameplay intéressant.

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